jeudi 19 mai 2011

Jeffrey Carr: Un PDG seul est une cible de grande valeur pour les Etats et organisations

« LE CHOIX DE DSK DE SE DÉPLACER SEUL A L’ÉTRANGER ÉTAIT POUR LE MOINS PROBLÉMATIQUE » SELON L’EXPERT AMÉRICAIN JEFFREY CARR


Le 8 mars dernier, Jeffrey Carr (*), fondateur de Taïa Global (**) intervenait depuis Seattle dans le cadre de la conférence Stuxnet organisée par NanoJV à l’Atelier BNP-Paribas (voir ici). Il nous donne aujourd’hui son point de vue sur l’affaire DSK sous l’angle sécurité.

NANOJV : vous semble-t-il normal qu’un homme que l’on présente comme l’un des plus puissants du monde (patron du Fonds Monétaire International, favori aux présidentielles françaises de 2012) voyage seul à l’étranger, et s’expose dans une chambre d’hôtel où  n’importe qui,  comme on l’a vu, peut faire irruption ?
JEFFREY CARR : La plupart des patrons que je connais ne voyagent pas seuls à l’étranger sans équipe de sécurité. Le choix de M. Strauss Kahn de se déplacer sans escorte est pour le moins problématique. (« Mr. Strauss-Kahn’s choice to travel without the benefit of a team is problematic, to say the least »).
NANOJV : Concernant les déplacements de patrons ou de hautes personnalités à l’étranger, quelles sont les meilleures pratiques à suivre pour éviter de tomber dans un piège ?
JEFFREY CARR : Je placerai en tête de liste: « Ne rien commettre d’illégal. » (« Don’t do anything illegal would be at the top of my list »).
NANOJV : Aujourd’hui la sécurité des personnalités n’est pas seulement physique, elle est aussi cybernétique. A quels types de dangers une personnalité de haut niveau en déplacement à l’étranger s’expose-t-elle?
JEFFREY CARR : Les PDG sont universellement considérés comme des cibles de grande valeur par les États et certaines organisations spécialisées dans les cyber-opérations.  On a vu des cas de réseaux d’entreprises compromis à la suite de l’infection de l’ordinateur portable du PDG au cours d’un déplacement. (« CEOs are universally considered high value targets by State and Non-State actors who engage in cyber operations of various types »).
NANOJV : Dans l’affaire DSK, certains médias ont laissé entendre qu’il aurait pu être localisé à l’aéroport par la police grâce à l’un de ses téléphones (***) est-ce que cela signifie que techniquement d’autres organisations auraient pu le localiser de la même manière ?
JEFFREY CARR: Les opérateurs coopèrent sur réquisition des autorités pour fournir des services de géolocalisation. Le commun des mortels ne peut réaliser cela,  pour autant il existe des hackers spécialisés dans ce genre de choses. (…«Most people wouldn’t be able to do that however there are hackers who specialize in such things»).
NANOJV : Pensez-vous que l’affaire DSK puisse être un coup monté (****) ?
JEFFREY CARR : Si l’on était en présence d’autre chose que ce que cela paraît être, la question qui se poserait serait : à qui tout cela profite-t-il ? (…«if it was anything other than what it appears to be, the question to ask is who benefits?»)
(*) Jeffrey Carr ,  fondateur et PDG de la société de sécurité Taïa Global Inc,  est aussi l’un des spécialistes en cyber intelligence les plus respectés aux États-Unis.  Son expertise porte notamment sur  les cyber guerres  et les attaques informatiques contre les gouvernements et les infrastructures vitales. Il est consulté régulièrement par les agences gouvernementales américaines et alliées au sujet des cyber stratégies russes et chinoises.  Son livre best seller «Inside Cyber Warfare» a été préfacé par le patron de l’US Strategic Command. 
(**) La société de sécurité Taïa Global est spécialisée dans l’escorte à l’étranger de personnalités du Forbes 2000. Taïa Global propose des services de cyber-protection, d’intelligence opérationnelle, des services d’audit de sécurité et de forensique d’intrusion. « Taia Global, Inc. provides executive cyber protective services, operational intelligence, due diligence investigations and intrusion forensics for Global 2000 companies. »
(***) Selon le journal le Monde citant l’avocat de DSK, « …c’est Dominique Strauss-Kahn lui-même qui avait contribué à sa localisation. Lorsqu’il arrive à l’aéroport, il reçoit un appel de l’hôtel à propos de son téléphone portable (…) et leur dit : ‘Je suis à tel endroit’, et met en place un dispositif pour qu’on lui apporte son téléphone ».
(****) Au vu des premiers éléments du dossier, l’hypothèse d’un complot n’est pas considérée comme une piste sérieuse par les experts, qui  s’en tiennent comme Jeffrey Carr à  « ce que cela paraît être » (la circonlocution renvoie aux termes de l’acte d’accusation). 

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